Festival de Cannes 2025 – Séances spéciales – Film d’animation
Pays de production: France, Belgique, Luxembourg – Durée : 90 minutes – Date de sortie : 15.10.2025
(par Roberto Tirapelle)
Sylvain Chomet a réalisé un nouveau film d’animation, beaucoup plus audacieux que ses précédents, puisqu’il s’agit d’un biopic sur Marcel Pagnol. Le résultat est riche en émotions, un film assurément destiné aux adultes, qui pourront explorer l’évolution de son art dramatique et de son cinéma.
SYNOPSIS: A l’apogée de sa gloire, Marcel Pagnol reçoit la commande d’une rédactrice en chef d’un grand magazine féminin pour l’écriture d’un feuilleton littéraire, dans lequel il pourra raconter son enfance, sa Provence, ses premières amours…. En rédigeant les premiers feuillets, l’enfant qu’il a été autrefois, le petit Marcel, lui apparaît soudain. Ainsi, ses souvenirs ressurgissent au fil des mots : l’arrivée du cinéma parlant, le premier grand studio de cinéma, son attachement aux acteurs, l’expérience de l’écriture. Le plus grand conteur de tous les temps devient alors le héros de sa propre histoire.
Sylvain Chomet revient à Cannes après sa présence en 2003 avec Les Triplettes de Belleville, hors compétition, qui le fait connaître sur le marché international puis en 2006 dans la section Un certain Regard avec Paris, je t’aime.
Chomet est un artiste aux multiples facettes. Il a notamment été concepteur et scénariste de bandes dessinées, réalisateur et scénariste de films d’animation français. Les Triplettes de Belleville, premier long métrage d’animation, a rencontré un vif succès public et critique à de nombreuses reprises et a été nominé aux Oscars dans deux catégories (meilleur film d’animation et meilleure chanson originale). L’Illusionniste, long métrage d’animation basé sur un scénario écrit par Jacques Tati, qui a adapté, créé et non composé la musique, sortira également. Le film a reçu l’European Film Award et est nominé aux Golden Globes et aux Oscars dans la catégorie meilleur film d’animation. Il a également reçu le César du Meilleur Film d’animation.

Son nouveau film est un autre film d’animation biographique et poétique du scénariste et réalisateur Marcel Pagnol, considéré comme une référence du cinéma français. Chomet explique avoir rencontré Marcel Pagnol à l’école, alors qu’on lui imposait de lire La Gloire de mon père et Le Château de ma mère. Chomet explique : « Ils avaient un style accessible et vivant. Je les trouvais bien dessinés. » Il explique ensuite que « ses films étaient diffusés à la télévision et je lisais ses pièces de théâtre. » Chomet poursuit : « L’écriture de Pagnol est toujours juste. Il trouve toujours la corde sensible. Il écrit des tragédies, des conflits familiaux, des personnages sombres, des scènes crues, mais grâce à sa parfaite maîtrise du verbe, il y a toujours, sous une forme de détachement et d’humour, une véritable élégance. » En réalité, c’est là le fondement du travail créatif de Pagnol et le plaisir que Chomet a pris à approcher le maître.
L’idée du film est née il y a quelques années lorsque le réalisateur a été contacté par Nicolas Pagnol, petit-fils de Marcel Pagnol, et le producteur Nicolas Poiret. Intéressés par la réalisation d’un documentaire, ils ont été séduits par la proposition, qui n’avait jamais tenté l’aventure. Pour présenter le documentaire aux financiers, Chomet avait créé des images d’archives des films de Pagnol, alternant avec des séquences animées. La présentation a été si bien accueillie que Chomet a décidé de réaliser un film d’animation, ce qui correspondait parfaitement à sa veine artistique. De plus, cela aurait été une occasion unique de travailler sur un biopic complet en animation.

Pour Chomet, il s’agit de son premier film d’animation dialogué. En effet, dans Les Triplettes de Belleville, « je ne m’intéressais qu’aux gestes des personnages », précise le réalisateur. Pour « L’Illusionniste », les dialogues, issus de l’œuvre originale de Jacques Tati, étaient quasiment inexistants. Pourtant, « dans l’œuvre de Pagnol, la voix humaine est essentielle », précise Chomet. Le film est donc un mélange du texte original et d’autres éléments développés par le réalisateur, inspirés par le grand maître.
Selon Chomet, son petit-fils Nicolas Pagnol fut une source d’inspiration fondamentale et connaissait parfaitement l’œuvre de son grand-père. Une relation de confiance essentielle s’est ainsi établie.
Le film retrace son adolescence, mais surtout sa carrière de réalisateur, de l’un des plus grands dramaturges français à l’un des plus grands réalisateurs. Un homme qui a traversé le XXe siècle, les débuts et les innovations de l’industrie cinématographique.
Le film comprend une section consacrée au théâtre. Dans ce cas, les plans durent longtemps, sans mouvement de caméra ; les acteurs doivent occuper l’espace scénique. Les personnages sont vus souffrant, souriants et semblant vivants. La section animation devait alterner avec des séquences d’archives appropriées à la séquence d’animation. Parmi ces séquences d’archives, un film qui semblait détruit a été retrouvé, mais a finalement été ramené à la vie sous le nom de La Prière aux étoiles.

Pour la partie cinématographique, le réalisateur a largement utilisé la caméra et a intégré le cinéma d’action, toujours en animation.
Créer les graphismes du personnage de Pagnol a également été une tâche très exigeante. En effet, son visage est différent de celui du film. Cependant, le réalisateur souhaitait mettre en valeur son nez. Ils ont créé des modèles 3D pour le représenter aux différentes époques du récit.
Pagnol est né en 1895 (Aubagne, Bouches-du-Rhône), l’année de la naissance du cinéma, avec « L’Arrivée d’un train en gare de La Ciotat ». Coïncidence, il fut l’un des premiers à réaliser des films sonores français. Il devint également un ami proche de Bob Kane, le patron de Paramount.
Acteurs de doublage
Laurent Lafitte incarne Pagnol. Acteur, réalisateur et humoriste français, retraité de la Comédie-Française de 2012 à 2024, il était l’homme de cérémonie du Festival de Cannes cette année. C’est un acteur dont la carrière est un véritable trésor, surtout compte tenu de son jeune âge (52 ans). Pour le doublage, ils ont fait appel à Pagnol, retraçant sa vie de 27 à 61 ans. Sa voix devait vieillir et donc perdre son accent. D’après les notes de Chomet : « Quand Marcel arrive à Paris, il a un fort accent marseillais, l’accent de son enfance, qu’il perd, même s’il en reste quelque chose.» « Il a le talent de se rendre invisible. »

Musique
La musique du film a été composée par Stefano Bollani, qui a su créer une émotion qui a imprégné tout le film et subjugué les spectateurs qui suivaient l’histoire de Pagnol. Chomet déclare : « Il a su magnifiquement rendre, en musique, ce que j’avais représenté en images. »
Direction artistique et supervision de l’animation
D’après les notes de production, le film comptait au moins une centaine de personnes, ce qui en faisait un projet d’envergure. Mais il est désormais évident que l’animation est un art du cinéma. La directrice artistique, Lana Choukroune, avait un double rôle : celle de character designer et de responsable de l’équipe layout, l’étape précédant l’animation, où elle devait préparer les personnages. Autrement dit, une fois les décors prêts, la réalisatrice redimensionnait les personnages et les faisait poser pour aider les animateurs à les animer. Une fois les premières poses clés créées, elles étaient vérifiées pour s’assurer de leur cohérence avec le modèle. Tout cela afin de comprendre les méthodes de travail nécessaires pour conserver le style de Chomet.
Xiaopeng Jiao, responsable de la supervision de l’animation, était chargée de superviser le style des visages, des costumes et de la gestuelle. Elle devait étudier le visage de Pagnol, celui de sa femme et celui de Fernandel.

© What The Prod, Mediawan Kids & Family, Bidibul Productions, Walking The Dog
Avec le voix de :
Laurent LAFITTE
Géraldine PAILHAS
Thierry GARCIA
Anaïs PETIT
Vincent FERNANDEL
Véronique PHILIPPONNAT
Fiche Technique
Réalisation et scénario : Sylvain Chomet, d’après l’essai Confidences de Marcel Pagnol
Musique : Stefano Bollani
Photographie : Elric Lefeuvre
Montage : Samuel Denou, Mario Houles et Julie Salon
Création des costumes : David Belugou
Production : Ashargin Poiré, Valérie Puech, Aton Soumache, Lilian Eche et Eric Goossens
Sociétés de production : What The Prod, Mediawan, Bidibul Productions, Walking The Dog, en association avec la SOFICA Entourage
Sociétés de distribution : Wild Bunch Distribution (France)
