con Bérénice Bejo
Festival de Locarno — Durée : 1h33 – Nationalité : Belgique, France
éditè par Roberto Tirapelle
Le deuxième long métrage de César Diaz sur la dictature guatémaltèque met en avant l’engagement et la parentalité, mêlant action et sobriété. Bérénice Bejo poursuit sa belle carrière.
SYNOPSIS: 1986. Maria, militante révolutionnaire guatémaltèque, est depuis des années exilée à Mexico où elle poursuit son action politique. Alors que son fils de 10 ans vient vivre avec elle, elle devra faire un choix cornélien entre son rôle de mère ou celui d’activiste.
César Diaz est un réalisateur, scénariste et directeur de la photographie guatémaltèque naturalisé belge. Après des études au Mexique et en Belgique, il a suivi l’atelier d’écriture de scénario de la FEMIS à Paris. Depuis une dizaine d’années, il travaille dans le montage, la fiction et le documentaire. Ses œuvres ont été présentées dans de nombreux festivals. « Territorio Liberado » a remporté le prix Imcine au Mexique, tandis que son premier long métrage « NUESTRAS MADRES » a remporté la Caméra d’Or en 2019 pour sa présentation à la 58e Semaine de la Critique. Il développe actuellement « Invisible Ink », une série belgo-uruguayenne.
“Mexico 86” est son deuxième long métrage, présenté en première mondiale à Locarno, un film sur la résistance guatémaltèque contre le régime.

Lors de la présentation du film, nous avons lu des déclarations du réalisateur, très fortes. Le film a cette force et cette intimité, entre militantisme et parentalité. Le film retrace d’ailleurs son expérience : « Je suis né en pleine guerre civile au Guatemala. Ma mère a participé à la lutte contre la dictature et a dû s’exiler au Mexique quand j’avais trois ans. Elle l’a fait pour sa sécurité, mais aussi pour pouvoir continuer à se battre. Je suis resté au Guatemala avec ma grand-mère. C’est pour cette raison que je n’ai jamais été le fils de ma mère. J’étais le fils de ma grand-mère… Mais je n’ai jamais douté de l’amour de ma mère pour moi. »
C’est la figure de la mère qui soulève de nombreuses questions, est-elle compatible avec la lutte révolutionnaire?
À cette question, Diaz répond : « Avec ce film, je souhaite comparer l’engagement politique et la lutte armée vécus par ma mère (et bien d’autres) à une réalité simple : être mère. Il existe une profonde contradiction entre les deux. Bien que ces militantes aient consacré leur vie à bâtir un monde meilleur pour leurs enfants, elles n’avaient plus la place de remplir leur rôle de parents. »
Le réalisateur sait parfaitement saisir les codes du film d’espionnage, même si le film ne présente aucune turbulence particulière. Le scénario et la mise en scène inventent avec brio les différentes identités du protagoniste afin de préserver sa mission.
Même dans le film précédent de Diaz, « NUESTRAS MADRES », le thème et le décor sont presque similaires, deux femmes sont unies dans la même atrocité, celle d’affronter le régime.
Je voudrais souligner que le contexte est toujours celui de « Mexico 86 » où nous avons affaire à l’un des conflits les plus sanglants d’Amérique latine, d’abord sous le commandement du général Romeo Lucas García, puis avec le dictateur encore plus sanglant Efraín Ríos Montt.
Dans « Mexico 86 », l’accent est mis sur la femme/les femmes, mais le film, dans sa deuxième partie, s’étend aux relations entre la protagoniste et son fils, qui renoue avec sa mère. Si le premier long-métrage était plutôt documentaire, même s’il était proche de la réalité avec des acteurs non professionnels, « Mexico 86 » est un véritable film avec des acteurs connus.
Acteurs

Bérénice Bejo est une actrice franco-argentine née à Buenos Aires, aujourd’hui reconnue pour sa carrière consacrée au cinéma de qualité. Le film qui lui a valu le plus de succès est sans conteste « The Artist », qui lui a valu de nombreux prix. Sa vie privée est également marquée par la dictature. En effet, à l’âge de trois ans, sa famille s’installe en France pour fuir la dictature civilo-militaire argentine (1976-1983). Son père l’inscrit à l’école d’art dramatique Les Enfants Terribles.
Il existe donc un parallèle entre la vie de Diaz et celle de Bejo. L’actrice semble avoir accepté la mission car « comme il ne s’agissait ni de mon histoire ni de mon pays, je me sentais protégée ». Bejo poursuit : « Je suis très attachée au devoir de mémoire et à la transmission du savoir. Pourtant, je viens d’une famille qui ne m’a pas beaucoup parlé de mon pays, l’Argentine. Je pourrais même dire que mes parents ont renoncé. Mais j’y suis retournée plusieurs fois et mes enfants sont bilingues. »
Bérénice Bejo s’immerge totalement dans cette histoire où elle est constamment frappée par les ennemis. Tout au long du récit, son interprétation évolue au gré de la tension émotionnelle envers son fils, tandis que celui-ci grandit. César Diaz décrit ainsi son actrice sur le tournage : « Chaque scène était enrichie par les nombreuses contributions de Bérénice. Elle en changeait la profondeur ! Nous étions notamment d’accord sur l’idée de ne pas tomber dans le pathos, de contenir les émotions. Tout devait être transmis par le regard, par les petits détails. Ce fut un réel plaisir de travailler avec elle ! »

Matheo Labbé est un acteur mexicain, qui en est à sa première apparition. Il a interprété le fils de Maria avec une interprétation sobre. Mais le réalisateur nous en dit plus : « Je l’ai choisi parce qu’il avait quelque chose de très mature pour un enfant de 10 ans. J’ai travaillé avec lui sur le plateau d’une manière unique. Par exemple, j’ai interdit à quiconque de lui donner le scénario. Il bougeait visuellement, mais avec une grande confiance, car je le rassurais constamment en lui disant que je serais toujours là, que je le mettrais en sécurité. On n’a pas le droit de pousser les enfants dans des endroits sombres et de les laisser seuls. En fait, je voulais travailler sur ses émotions et la façon dont son corps réagissait, à chaque scène. Ça a très bien fonctionné ! De plus, il a développé une complicité fantastique avec Bérénice. »
Photographie
Virginie Surdej, directrice de la photographie à l’origine d’une cinquantaine d’œuvres, collabore pour la deuxième fois avec Diaz. Pour « Mexico 86 », une attention particulière a été portée à l’éclairage, notamment la nuit et les intérieurs. Le réalisateur et Surdej avaient déjà planifié les positions de caméra et l’éclairage bien avant le tournage afin de créer la tension la plus appropriée.
Diaz déclare : « Nous avons pu puiser dans des références photographiques et cinématographiques pour trouver la matière, la couleur et le style de « Mexico 86 ».
Musique
Rémi Boubal est un compositeur français dont la carrière s’étend depuis 2013 entre longs et courts métrages. Le réalisateur avait déjà collaboré avec lui. Pour le film, il a créé une musique à la fois angoissante et puissante, tant pour les scènes intimes que pour les scènes d’action. Le réalisateur la définit ainsi : « Ce que j’apprécie vraiment dans sa musique, c’est qu’elle ne crée pas les émotions du spectateur ; elle l’accompagne. Le spectateur conserve sa liberté. »
“Mexico 86” un film de César Diaz
Liste Artistique
Maria Bérénice Bejo
Marco Matheo Labbé
Miguel Leonardo Ortizgris
Eugenia Julieta Egurrola
Liste Technique
Scénario : César Díaz
Musique : Rémi Boubal
Décors : Pilar Peredo
Costumes : Sabrina Riccardi
Photographie : Virginie Surdej
Son : Bruno Schweisguth, Charles de Ville et Gilles Benardeau
Montage : Alain Dessauvage
Production : Anne-Laure Guégan et Géraldine Sprimont
Coproduction : Delphine Schmit et Hans Everaert
Société de production : Need Productions, Tripode Productions, Pimienta Films, Menuet, RTBF, Voo, Proximus et Shelter Prod
Société de distribution : BAC Films et Goodfellas
(cr ph BacFilms)
