60 Semaine de la Critique â Cannes 2021
Sandrine Kiberlain, premiÚre actrice, devenue réalisatrice, un succÚs.
par Roberto Tirapelle
SYNOPSIS: IrĂšne, jeune fille juive, vit lâĂ©lan de ses 19 ans Ă Paris, lâĂ©tĂ© 1942. Sa famille la regarde dĂ©couvrir le monde, ses amitiĂ©s, son nouvel amour, sa passion du théùtre…IrĂšne veut devenir actrice et ses journĂ©es sâenchaĂźnent dans lâinsouciance de sa jeunesse.

Je suis allĂ© le voir avec un certain scepticisme, peut-ĂȘtre pas trĂšs attirĂ© par un titre aussi lĂ©ger, pas comme ceux qu’on a dĂ©sormais l’habitude de lire pour de nombreux films romantiques. Pendant et aprĂšs la projection, le film m’a complĂštement surpris. Alors j’ai bien compris la lĂ©gĂšretĂ© du titre qui fait corps avec la beautĂ© poĂ©tique du film.
Sandrine Kiberlaine, aprĂšs une longue et intĂ©ressante carriĂšre d’actrice, devient rĂ©alisatrice pour la premiĂšre fois et tourne un film extraordinaire de la premiĂšre Ă la derniĂšre sĂ©quence. Elle a traitĂ© les personnages avec une extrĂȘme clartĂ© de dessin et d’images, et les interprĂštes l’ont accompagnĂ©e au maximum, l’Ă©criture est particuliĂšrement prĂ©cise. Tout est si simple et profond. Le contexte historique est toujours prĂ©sent mĂȘme s’il ne se voit pas ou se voit Ă peine.
On ne sait comment catĂ©goriser UNE JEUNE FILLE QUI VA BIEN, sĂ©lectionnĂ© Ă la Semaine de la Critique du Festival de Cannes 2021, comme film d’auteur ou d’actrice. Certes, cela se compare bien Ă la personnalitĂ© de son auteur et de l’histoire, les deux se croisent Ă©galement pour l’interprĂ©tation de Rebecca Marder, lĂ©gĂšre et insaisissable, un amour lorsqu’elle joue au théùtre pour entrer au Conservatoire, ensoleillĂ©e envers les autres, fragile et forte avec le famille.

Quelques déclarations faites par Sandrine Kiberlain:
Quâest-ce qui a dĂ©clenchĂ© en vous le dĂ©sir de passer derriĂšre la camĂ©ra?
âLâenvie de mâexprimer autrement. Jâattendais aussi dâavoir le bon point de vue sur une histoire pour avoir lâimpression de raconter un rĂ©cit « autrement ». Avec ce projet, je pouvais raconter une jeune fille et une pĂ©riode de façon trĂšs personnelle. Et le moyen de raconter une telle
histoire ne pouvait ĂȘtre que le cinĂ©ma, mon art prĂ©fĂ©rĂ© entre tous. Je ne me serais pas lancĂ©e si je ne mâĂ©tais pas sentie « capable » dâĂȘtre Ă cette place-lĂ . Ayant dĂ©jĂ fait un court-mĂ©trage, je savais que jâĂ©tais trĂšs heureuse Ă cet endroit-lĂ alors que je nâavais jamais prĂ©mĂ©ditĂ© de devenir rĂ©alisatrice. Mais quand jâai une histoire qui me tient Ă cĆur, quand jâai une « vision » de cette histoire, alors je mâautorise Ă la mettre en scĂšne et Ă utiliser les moyens du cinĂ©ma pour la raconter. Dans mon parcours dâactrice, je nâai jamais Ă©tĂ© enfermĂ©e dans une loge, jâai toujours Ă©tĂ© avec lâĂ©quipe sur le plateau, le travail collectif du tournage mâa toujours passionnĂ©e, avec la solidaritĂ© entre les diffĂ©rents postes. Ă mesure que les annĂ©es ont passĂ©, jâai rĂ©alisĂ© Ă quel point un film pouvait ĂȘtre fichu si un des postes nâĂ©tait pas Ă la hauteur. De plus en plus, jâai mesurĂ© lâimportance de toute lâĂ©quipe jusquâau perchman ou Ă lâaccessoiriste. Et Ă force dâentrer dans lâaventure dâun autre ou dâune autre, jâai eu envie de mon aventure Ă moi. â

Comment avez-vous procĂ©dĂ© pour faire passer la jeunesse, la vitalitĂ© et la luminositĂ© dâIrĂšne?
â19 ans, câest lâĂąge de tous les possibles. Et pour moi, câest lâĂąge dâune renaissance parce que câest Ă cet Ăąge-lĂ que je me suis dĂ©couverte actrice, que jâai fait mes premiers pas dans une Ă©cole de théùtre. Pour cela, je trouvais beau de parler de la fougue dâune hĂ©roĂŻne, de son Ă©lan perpĂ©tuel, pour quâon sâattache Ă cette force de vie et que ce soit encore plus dĂ©chirant si cette pulsion de vie sâarrĂȘte. 19 ans, câĂ©tait mon plus bel Ăąge, et cela correspondait aussi Ă des films que jâai aimĂ©s.â
La vitalitĂ© dâIrĂšne/Rebecca passe-t-elle dans la mise en scĂšne par le mouvement quasi-incessant?
âLe mouvement, câĂ©tait un point dâhonneur pour moi et je lâai tout de suite dit Ă Guillaume (Schiffman, le chef opĂ©rateur). Tout devait circuler dans lâappartement, je voulais quâIrĂšne aille tout le temps vite, la camĂ©ra est toujours en mouvement avec elle, en travelling, Ă lâĂ©paule.
Si jâavais pu faire un seul plan-sĂ©quence dâIrĂšne de bout en bout, je lâaurais fait volontiers.â
Rebecca Marder est Ă©poustouflante dans le rĂŽle dâIrĂšne. Vous lâavez dĂ©couverte au théùtre ou au cinĂ©ma?
âJe lâavais vue et remarquĂ©e au théùtre. Au casting, on a vu beaucoup de filles. Et puis Rebecca est entrĂ©e dans le bureau, avec sa maladresse gracieuse, pas du tout poseuse, vivante, avec son talent, ce mĂ©lange dâhumour et de fond de gravitĂ© que je cherchais pour le personnage : aprĂšs elle, plus besoin de poursuivre le casting pour IrĂšne. Sans doute avons-nous le mĂȘme âinstinctâ dâactrice, on nâavait pas besoin de se parler beaucoup pour se comprendre. Elle a une mobilitĂ© incroyable dans le visage, elle me fait penser Ă des actrices sublimes comme Ingrid Bergman, Gene Tierney, Nastassja Kinski, ou Anne Brochet. Je suis tombĂ©e en amour pour Rebecca.â
Quelques déclarations faites par Rebecca Marder:

Quels points communs avez-vous avec le personage dâIrene?
âJe me suis sentis trĂšs proches dâelle parce que pour moi la pĂ©riode des concours ce nâest pas si loin. En ça, je me sentais trĂšs proche dâelle. Cette envie de jouer, de se trouver Ă des tournants de vie, parce quâelle a 19-20 ans, parce quâelle est amoureuseâŠ.je me sui sentie trĂšs proches dâelle.â
Parlez-nous de votre rencontre avec Sandrine Kiberlain?
âCâetait un casting. ça a Ă©tĂ© immĂ©diat pour elle e pour moi. Enfin, câest ce quelle me raconte. En tout cas, pour moi câetait un coup de foudre immĂ©diat. Le fait quâelle soit actrice la rendait encore meilleure directrice dâacteurs quâelle ne lâĂ©tait dĂ©jĂ . Elle avait une empathie pour nous et une sensibilitĂ©. Et puis, sur le plateau elle souvait tellment ce quâelle faisait. Câetait presque de lâobsession parfois du bout de costume dâuntel jusquâĂ la focale. Elle conessait tout.â
Quâavez-vous le plus apprĂ©ciĂ© dans ce tournage avec Sandrine Kiberlain?
âJâai lâimpressione dâavoir tellment Ă©te aimĂ©e par Sandrine. Câest presquâune rencontre qui tient du copu de foudre et ca mâa portĂ©. Je pense que Sandrine avait cette gĂ©nĂ©rositĂ© lĂ me donner confiance. Elle mâa filmee et aimee sous toutes mes coutures. Câetait trĂšs agrĂ©able. Parfois, elle Ă©tait a un mĂštre de moi derriĂšre son Ă©cran je sentais quâelle pouvait etre gagnĂ©e par une Ăšmotion et lâĂšmotion me gagnait aussi. Elle sâest complĂštement imposĂ©e avec pudeur. Elle trouvait sa place. â
Cast:
IrĂšne REBECCA MARDER DE LA COMĂDIE FRANĂAISE – AndrĂ© ANDRĂ MARCON – Igor ANTHONY BAJON – Marceline FRANĂOISE WIDHOFF – Viviane INDIA HAIR – Josiane FLORENCE VIALA DE LA COMĂDIE FRANĂAISE – Jo BEN ATTAL – Jacques CYRIL METZGER – Gilbert JEAN CHEVALIER DE LA COMĂDIE FRANĂAISE
Tecnico
Réalisatrice: Sandrine Kiberlain
Scénario: Sandrine Kiberlain
Directeur de la photographie: Guillaume Schiffman
Montage: François Gédigier
Son: Jean-Pierre Duret
Mixage: Cyril Holtz
Montage son: Gurwal Coic-Galla
Musique originale: Marc Marder et Patrick Desreumaux
Décors: Katia Wyszkop
Costumes: Emmanuelle Youchnovski