Un film d’illusions où tout se passe sur scène

par Roberto Tirapelle

SYNOPSIS

Julien Delaunay a disparu sur un champ de bataille de la Grande guerre. Sa femme, Julie, ne croit pas qu’il soit mort. Et quand la presse publie le portrait d’un homme amnésique, elle est certaine de reconnaitre Julien. Ils se retrouvent et réapprennent à s’aimer. Mais une autre femme réclame cet homme comme étant son mari.

(sur la photo de g. KARIM LEKLOU et LOUISE BOURGOIN, cr pf. Alexe Pixelle)

Guillaume Bureau vient du théâtre et on le voit tout de suite dans son premier long métrage. Il a commencé à réfléchir à ce projet il y a plusieurs années et en 2017, il décide de quitter Paris pour Monceaux le Compte, un village de la Nièvre. Commencez à écrire le scénario et réalisez le film. Un début très calculé mais le résultat est très positif, à bien des égards : casting (Adélaide Mauvernay), décor (Catherine Jarrier ADC), photographie (Colin Lévêque SBC), costumes (Nathalie Raoul), décor, montage (Nicolas Desmaison), un équipe technique certainement à la hauteur de ses ambitions.

Le film se déroule vers 1920 mais les combinaisons utilisées pour revenir largement sur cette période ne trahissent pas une certaine modernité. Par exemple dans le développement d’interprétations d’artistes que les jeunes générations pourraient aussi aimer.

A commencer par Karim Leklou, le protagoniste qui a perdu la mémoire et qui est convoité par deux femmes bien différentes. La caméra le suit dans ses mouvements égarés et théâtraux. C’est un fou entre les cadences de deux femmes qui font tout pour l’éveiller avec des solutions scéniques, entre fiction et réalité. Fait-il aussi semblant ou sourit-il en faisant semblant?

(sur le photo LEÏLA BEKHTI, cr ph. Alex Pixelle)

Bien qu’administré dans un cadre théâtral, le récit évolue toujours avec ponctualité et aisance. Le décor où travaille Julie (Leila Bekhti) est un studio photographique, un monde d’illusion, comme l’environnement où travaille Rose-Marie Brunet/Frimousse (Louise Bourgoin), un cabaret, un monde de paillettes, où tout est théâtral.

Un film d’illusions, où tout le monde monte sur scène, même les deux personnages incarnés par le protagoniste. Ce sera la justice qui définira la réalité et attribuera la valeur de l’identité. L’écran/scène se ferme mais les appréciations s’ouvrent pour un film élégant, agréable, dérangeant, harmonieux, éthéré.

Deux déclarations intéressantes du Bureau Guillaume sur les costumes et la musique de film:

Comment avez-vous travaillé sur les costumes ?

“Avec Nathalie Raoul, la cheffe costumière, on voulait des vêtements vivants et qui étaient une histoire, d’où notre choix d’aller vers des costumes qui ont déjà une certaine patine. Pour le personnage de Julie, Nathalie s’est inspirée des femmes artistes et avant-gardistes des années 1920, comme Lee Miller, Berenice Abbott ou Virginia Woolf. Cela nous a permis de vêtir Julie de manière moins conventionnelle que les femmes bourgeoises de son époque. Julie porte des robes sans entrave. Elle s’est réappropriée quelques pièces du vestiaire masculin. À l’inverse, la silhouette de Rose-Marie est extravagante et baroque. Les costumes de Louise Bourgoin sont directement inspirés de l’univers du cabaret des années 20. J’avais demandé à Nathalie, des plumes, de la fourrure et du strass. Avec Anne Bochon, la coiffeuse, on a imaginé différentes perruques pour les numéros chantés. Tout le travail autour de ce personnage était un véritable terrain de jeu. Quant à l’amnésique, le nombre de ses costumes est réduit. Il porte le plus souvent l’uniforme de l’asile, celui des anonymes. Mais il n’a qu’un costume quand il est Julien, et un autre quand il est Victor. Le costume joue un rôle significatif, indiquant l’évolution du personnage.”

Quelles étaient vos exigences en matière de musique?

“J’avais envie d’une musique orchestrale aux tonalités lyriques assumées, une musique qu’on se remémore en sortant de la salle, comme un refrain. Mon idée était qu’à partir de ce thème, soient déclinés les différents morceaux de la musique du film. En Romain Trouillet, j’ai trouvé le compositeur idéal pour concrétiser cette envie. Lorsque j’ai démarré le tournage, Romain avait déjà composé le thème principal. C’était un atout car cela donnait, d’emblée, une couleur à certaines séquences. L’autre partie du travail concernait les musiques de cabaret et surtout, les chansons de Louise Bourgoin. Louise interprète un classique de la Belle Époque, Fascination, mais également une chanson méconnue de Marie Dubas, L’amour est un jeu. Pour la troisième chanson qui intervient à un moment-clef du film, Romain a sollicité Renan Luce qui a écrit des paroles tout spécialement pour un tour de chant incluant un numéro de lancer de couteau: Je sens bien que je vous plais. Pour l’accompagner, Romain a composé dans l’esprit de l’opérette, teinté de quelques harmonies plus riches et novatrices pour l’époque.”

Guillaume Bureau)

GUILLAUME BUREAU – Bio

Après des études de sciences du langage et d’audiovisuel, Guillaume Bureau travaille au théâtre comme acteur et assistant à la mise en scène. Parallèlement, il réalise plusieurs courts, alternant films produits et autoproduits, dont MM, last interview (FID, IndieLisboa, Ecrans documentaires) ou Sylvain Rivière (diffusé en festivals et sur France 2). Longtemps, il a été lecteur de scénarios pour mk2, France 2 cinéma et Canal +.

lISTE ARTISTIQUE

Julie Delaunay LEÏLA BEKHTI – L’homme KARIM LEKLOU – Rose-Marie Brunet / Frimousse LOUISE BOURGOIN – Antoine JEAN-CHARLES CLICHET -Docteur Gramont GHISLAIN DE FONCLARE – Carlotta VÉRONIQUE RUGGIA SAURA – Alice JEANNE COHENDY

Pays d’origine: France, Belgique – en salle le 5 avril 2023